mercredi 29 novembre 2006

L'ARRIVEE DU CHEMIN DE FER A SERRES (05)

La ligne de chemin de fer était en construction, commencée vers 1870 elle fut mise en service en 1875.Le premier train passa à Serres le 1 février 1875.Cet énorme chantier occupait beaucoup fouvriers et le vin se vendait bien..... En 1870, mon grand père Jean Joseph REYNAUD avait acquis les Barillons,qui était en partie haute tout planté en vigne. Il y fit construire le cabanon en 1875,il fit également venir une prise d'eau sur la Blême. MOULIN son voisin lui vendit le passage sur sa propriété REYNAUD se chargeait de l'entretien de la prise. Le canal franchissait la Blême au sommet de la digue qu'il fit construire à cet effet Mon grand père devait mettre Peau au canal au mois d'avril si le temps le nécessitait.La construction de la ligne de chemin de fer offrait un avenir plein de promesses et avait apporté beaucoup d'argent dans le pays. Les chemins de fer expropriaient à des prix très élevés les terres telles celles arrière- grands-parents de Guy MOULIN qui furent expropriés pour construire la gare de Serres, la terre plantée en vigne fut payée un gros prix.Bonne affaire, car presque tout de suite le Phylloxéra (maladie des racines de la vigne) anéantit le vignoble français (et Serrois). Mon grand-père, qui récoltait alors 80 hectolitres de vin, était tombé l'année d'après à 6 hectolitres et plus rien l'année suivante. Ce fut presque la ruine....A Montclus, les vignes s'étendaient presque jusqu'au rocher.A Serres la vigne s'étendait de partout, le vallon de Saumane jusqu'au rocher pointu, Chauvin était tout planté, le village retraite n'était qu'une vigne, jusque dans Arambre, le Chaussais.Au pas de la Ruelle, Le rocher d'Agnelle était planté également, un câble traversait le Buëch en face le tunnel du chemin de fer.le vignoble se reconstruira lentement, après beaucoup d'essais.Le remède fut le greffage de nos plants de pays sur des porte-greffe américains, vigne sauvage très résistante. Mais ce remède contre le Phylloxéra apporta d'autres maladies inconnues dans le passé comme l'oïdium ,le mildiou... Lentement les gens se remirent à replanter, mais le vignoble d'autrefois ne fut jamais reconquis..En 1912, le vignoble reconstitué produisit 2000 hectos de vin. En 1928 la vigne à Serres occupe 67 hectares.Aujourd'hui elle a presque disparu, ne se prêtant pas a la monoculture et la proximité des vignobles de la vallée du Rhône lui ont enlevé sa raison d'être.Les chemins de fer ouvraient une ère de prospérité, les produits agricoles se vendaient mieux, le débouché principal étant Marseille.Les éleveurs de moutons, qui auparavant gardaient 3 ans leurs agneaux afin qu'ils puissent arriver sans trop de perte (le trajet a pied leur faisait perdre du poids), trouvaient là un débouché.La gare de Serres connut à cette époque une grande affluence, ce fut un renouveau, les prix s'en ressentirent... L'exploitation des bois de mine pour les galeries de la Mure devint une industrie jusqu'aux années 60. Les quais de la gare des marchandises étaient encombrés, tout était expédié par chemin de fer. Les produits coloniaux commencèrent à arriver. La gare était un va et vient permanent de charrettes et de voyageurs.Les charretiers au long cours, comme on pourrait dire durent se recycler dans les courtes distances. Le Nyonsais continuait les transports hippomobiles, les courriers transportant de huit à dix voyageurs changeaient de chevaux a St May.Il y avait aussi les relais, ou les charretiers trouvaient assistance, ils pouvaient manger et dormir, restaurer leurs chevaux et même en trouver d'autres pour leur aider à grimper les côtes de trop forte déclivité. Ces hommes rustiques, habitués à tous les temps n'étaient pas difficiles. Quelquefois, ils attendaient qu'un lit se libère pour prendre la place toute chaude d'un autre. Ces relais avaient toujours une grande remise pour abriter les charrettes de la pluie mais aussi des voleurs, et une écurie pour les chevaux.Les charretiers de Nyons transportaient surtout du vin ils avaient sur leur charrette 3 gros tonneaux de 300 litres chacun, appelés "demi muit".Les rosannais Hugues et Pinet passaient sur la route au petit jour, chargés de bois et de frêts divers. Les charretiers avaient presque toujours deux chevaux à chaque charrette. Les colliers des chevaux étaient garnis d'une multitude de grelots que l'on entendait de loin. La guerre de 1914 -1918 mit fin au roulage et l'automobile prit le relais des chevaux. Ce fut également la fin des radeaux descendant les bois de sapin de St Julien et Lus la Croix Haute sur le Buëch en crue jusqu'à Meyrargues, Marseille et Avignon pour la construction navale. Ces radeaux étaient constitués de grosses billes de bois de sapin reliées entre elles par des cordes, de façon à laisser une partie plate pour les deux radeliers.A St Julien en Bochaine le radeau était construit sur le gravier du Buëch en basses eaux, amarré sur une rive à un arbre afin qu'une petite crue de la rivière ne le déplace. Les radeliers attendaient une crue importante, montaient sur le radeau avec quelques cordes, une couverture et quelques vivres et larguaient les amarres et...à la grâce de Dieu.... Les radeliers conduisaient le radeau avec des gaffes, il fallait éviter les rochers qui coupaient les cordes, si l'accident arrivait tout était perdu et les radeliers risquaient la noyade.A Serres il y avait une gare pour les radeaux qui permettait de radouber quelques avaries. Elle se trouvait vers le jeu de boules actuel ( le nom de lac persiste ), quand tout marchait bien il fallait 30 heures pour arriver a Meyrargues.Les radeaux destinés à la marine allaient en Avignon , empruntaient le Rhône et, arrivés à la mer, les bateaux les prenaient en remorque jusqu'à leur destination.De vieux Serrois racontent qu'un radeau passant sous l'ancien pont de gendarmerie, les cordes furent coupées par le rocher, le radeau se disloqua, une pièce de bois se dressa au milieu du Buëch un radelier s'y accrocha, nous étions en hiver ,les gens de Serres ne pouvant leur porter secours allumèrent de grand feux sur les berges, touché par la chaleur le rescapé battit des mains. Un autre radelier fut noyé vers le terrain de sport, ou le buëch passait avant la construction de la digue.La Gare de Serres.Le 1er Février 1875, le train passa en gare de Serres. Ce fut un grand événement, une fête.Le chef de gare était regardé comme une sommité ; il y avait un sous-chef et deux hommes d'équipe, une véritable curiosité, les gens venaient de Rosans, de Montmorin, de L'Epine et de tous les environs.La promesse aux enfants de les emmener voir passer la grande jument noire qui traînait plusieurs voituressuffisait pour les faire tenir sages durant plusieurs semaines.C’étaient en effet les premières voitures "marchant sans chevaux".Pour les voyageurs quelle différence avec les lourdes diligences... Cependant pour aller â Gap il fallait deux jours il n'y avait pas de retour dans la journée).Toutefois il y avait une certaine méfiance à prendre le train. Se rendant à Gap chez sa fille, mon grand père déclarait tout net ! le train c'est une guillotine. En sept heures j'y vais à pied...Cet événement était le prélude d'une grande mutation, l'énergie mécanique allait désormais détrôner l'énergie animale. Ce fut le début de l'industrialisation.II fallut encore 80 ans pour détrôner le cheval...

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